Une année en prépa ROLAND BARTHES : LA LANGUE EST FASCISTE !
Une année en prépa - Ein Podcast von DAMIEN CLERGET-GURNAUD
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Nous croyons spontanément que le langage est un simple outil : une sorte d’instrument transparent que nous utilisons pour désigner les choses. À force de parler, les mots deviennent pour nous aussi invisibles que les touches sous les doigts d’un pianiste aguerri. Nous pensons avec eux, mais nous ne pensons plus à eux.C’est précisément cette illusion que Roland Barthes pulvérise dans sa Leçon inaugurale au Collège de France. Car la langue n’est jamais un simple réservoir de mots disponibles. Elle n’est pas seulement un outil de désignation : elle est surtout un appareil social, un système de contraintes, un ensemble de normes tacites qui orientent nos discours avant même que nous en ayons conscience.La langue fixe d’avance ce qu’il est permis de dire, ce qu’il est inutile de dire et ce qu’il devient impossible de penser. Elle sélectionne, simplifie, oriente, impose — et c’est en ce sens, dit Barthes, qu’elle est « fasciste » : non parce qu’elle empêcherait de parler, mais parce qu’elle oblige à parler dans certaines formes, toujours déjà chargées d’attentes, de stéréotypes, d’idéologies.Cette puissance d’imprégnation, Victor Klemperer l’avait déjà mise au jour en étudiant la langue du IIIᵉ Reich : les idéologies ne s’imposent pas par les grands discours, mais par de minuscules mutations dans la langue commune. On avale les mots comme de petites doses d’arsenic — sans s’en rendre compte — et ce sont eux qui finissent par produire leur effet.Barthes généralise ce diagnostic : toute langue est travaillée par le pouvoir, quelle que soit l’idéologie qui l’utilise. On échappe rarement à cette emprise, sauf peut-être par l’écriture, qui rend les mots visibles, manipulables, transformables ; qui permet de les faire dérailler, de les subvertir, de rouvrir des possibilités de sens.Cet épisode explore cette idée essentielle : si nos dissertations, nos raisonnements, nos débats échouent si souvent, c’est parce que nous faisons une confiance aveugle aux mots que nous employons. Nous croyons nous servir du langage, alors que, bien souvent, c’est lui qui se sert de nous.Comprendre Barthes, ici, ce n’est pas faire un exercice d’histoire littéraire. C’est apprendre à penser.Damien CLERGET-GURNAUD est professeur agrégé. Il enseigne la culture générale aux ECG du lycée Pothier d'Orleans. Il est l'auteur de deux ouvrages parus aux éditions eyrolles : Agir avec Aristote, Vivre passionnément avec Kierkegaard. Il est également le créateur du site www.coursdephilosophie.fr#RolandBarthes #Langue #Sémiologie #Idéologie #Philosophie #Culture #CollègeDeFrance #AnalyseDuLangage #PenséeCritique #Dissertation #Prépa #Étudiants #UneAnnéeEnPrépaHébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.
